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Summaries Sunday: SOQUIJ

Every week we present the summary of a decision handed down by a Québec court provided to us by SOQUIJ and considered to be of interest to our readers throughout Canada. SOQUIJ is attached to the Québec Department of Justice and collects, analyzes, enriches, and disseminates legal information in Québec.

PÉNAL (DROIT) : Le juge de première instance aurait dû individualiser la peine imposée à l’appelant, reconnu coupable de plusieurs infractions de nature sexuelle; afin de lui permettre de conserver son emploi, des peines d’emprisonnement discontinu de 90 jours sous chacun des chefs, à purger concurremment, sont substituées à la peine globale de 15 mois de détention qui lui avait été imposée.

Intitulé : Morasse c. R., 2015 QCCA 74
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal, 500-10-005110-125 et 500-10-005263-122
Décision de : Juges Yves-Marie Morissette, Marie-France Bich et Marie St-Pierre
Date : 20 janvier 2015

PÉNAL (DROIT) — infraction — infractions de nature sexuelle — infractions sexuelles contre des enfants — contacts sexuels — incitation à des contacts sexuels — victimes âgées de moins de 14 ans — victime âgée de moins de 16 ans — accusé entraîneur de soccer — élément de l’infraction — intention spécifique — faits similaires.

PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — infractions de nature sexuelle — infractions sexuelles contre des enfants — contacts sexuels — incitation à des contacts sexuels — victimes âgées de moins de 14 ans — victime âgée de moins de 16 ans — accusé entraîneur de soccer — facteur aggravant — séquelles de la victime — dénonciation — dissuasion — individualisation de la peine — réinsertion sociale — maintien de l’emploi — harmonisation des peines — fourchette des peines — détention — peine discontinue — probation — ordonnance en vertu de l’article 161 C.Cr. — ordonnance de se soumettre à un prélèvement de substances corporelles à des fins d’analyse génétique — ordonnance de se conformer à la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels.

PÉNAL (DROIT) — procédure pénale — procédure fédérale — séparation des chefs d’accusation — désir de l’accusé de témoigner sous certains chefs seulement — faits similaires — infraction de nature sexuelle — obligation de motiver une décision — suffisance des motifs — application de R. c. W. (D.) (C.S. Can., 1991-03-28), SOQUIJ AZ-91111043, J.E. 91-603, [1991] 1 R.C.S. 742.

PÉNAL (DROIT) — preuve pénale — recevabilité de la preuve — faits similaires — infraction de nature sexuelle — nécessité de tenir un voir-dire — vice de procédure.

Appel d’une déclaration de culpabilité. Rejeté. Appel de la peine. Accueilli.

L’appelant a été reconnu coupable sous 6 chefs de contacts sexuels et d’incitation à des contacts sexuels commis à l’endroit d’enfants âgés de moins de 14 ans (art. 151 et 152 du Code criminel (C.Cr.))et sous 1 chef de contacts sexuels commis à l’endroit d’un enfant âgé de moins de 16 ans (art. 151 C.Cr). pour des faits survenus alors qu’il était entraîneur de soccer dans un collège. Un arrêt des procédures a été prononcé sous les six chefs d’agression sexuelle (art. 271 C.Cr.). Il a été condamné à 12 mois de détention sous les 6 premiers chefs, à purger de façon concurrente, et à 3 mois sous le dernier chef, à purger de façon consécutive aux autres peines, pour une peine totale de 15 mois de détention, assortie d’une probation de 3 ans et d’une ordonnance en vertu de l’article 161 C.Cr., une ordonnance de se soumettre à un prélèvement de substances corporelles à des fins d’analyse génétique et une ordonnance de se conformer à la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels pour une période de 20 ans. L’appelant interjette appel du jugement ayant rejeté sa requête en séparation des chefs d’accusation, de sa déclaration de culpabilité ainsi que de sa peine.

Décision
Mme la juge St-Pierre: 1) Séparation des chefs et preuve de faits similaires: Les articles 574 (1) et 591 (1) C.Cr. autorisaient l’intimée à déposer, au début du procès, comme elle l’a fait, un seul acte d’accusation comprenant l’ensemble des chefs énoncés aux deux dénonciations, alors que l’appelant avait été envoyé à procès sur l’ensemble de ces chefs à la suite de l’enquête préliminaire. Elle disposait d’un vaste pouvoir discrétionnaire pour décider d’inclure plus d’un chef d’accusation dans son acte d’accusation, peu importe s’ils provenaient de différentes dénonciations. La présente affaire se distingue de R. c. Clunas (C.S. Can., 1992-02-27), SOQUIJ AZ-92111038, J.E. 92-355, [1992] 1 R.C.S. 595, en ce que, en l’espèce, l’appelant est exclusivement accusé d’actes criminels. Le juge a bien appliqué les critères établis dans R. c. Last (C.S. Can., 2009-10-15), 2009 CSC 45, SOQUIJ AZ-50579351, J.E. 2009-1893, [2009] 3 R.C.S. 146. La déférence s’impose. En ce qui a trait à la preuve de faits similaires, il n’était pas obligatoire de tenir un voir-dire pour décider de la recevabilité de cette preuve. Cependant, dans sa décision portant sur la requête en séparation des chefs d’accusation, le juge a évalué le sérieux de cette preuve mais ne s’est pas prononcé sur sa recevabilité. Toutefois, cette erreur procédurale est sans conséquence. Dans son jugement final, le juge a énoncé les motifs qui l’ont conduit à recevoir cette preuve. 2) Intention spécifique et intention générale: C’est à tort que l’appelant prétend que le juge a traité le crime de contact sexuel comme une infraction d’intention générale. L’intention spécifique de l’appelant s’est révélée par ses manoeuvres pour se retrouver seul avec les jeunes dans un contexte de nudité. Le juge a considéré qu’une personne raisonnable aurait conclu à la nature sexuelle des gestes reprochés. Il a écarté la prétention de l’appelant voulant que ses gestes aient porté à interprétation étant donné le contexte de jeu. Le juge a exposé et appliqué correctement le droit relativement aux éléments constitutifs des infractions. 3) Motivation insuffisante et non-respect des critères établis dans R c. W. (D.), (C.S. Can., 1991-03-28), SOQUIJ AZ-91111043, J.E. 91-603, [1991] 1 R.C.S. 742: Le juge a résumé rigoureusement les témoignages de chacun des témoins en soulignant les contradictions et les différences. La preuve de faits similaires a apporté un degré de corroboration supplémentaire. Enfin, à bien des égards, les gestes reprochés étaient admis ou corroborés par l’appelant lui-même. D’autre part, un juge n’est jamais tenu de reproduire machinalement les trois étapes établies dans R. c. W. (D.). Les motifs du juge ne laissent pas voir qu’il a choisi entre deux versions, non plus qu’il a appliqué un fardeau de preuve autre que celui du doute raisonnable.
4) Principes de détermination de la peine: Le juge a commis une erreur de droit en n’individualisant pas la peine (Roy c. R.) (C.A., 2010-01-12), 2010 QCCA 16, SOQUIJ AZ-50596503, 2010EXP-350, J.E. 2010-188. Dans son application des huit critères établis dans R. c. L. (J.J.), alors que les gestes reprochés se situent au bas de l’échelle de gravité, le juge s’est limité à affirmer qu’ils n’étaient pas «de la catégorie la plus grave» et, parmi les circonstances aggravantes, il a retenu les «séquelles victimologiques à long terme» malgré la preuve administrée qui ne révélait pas d’effets à long terme, au contraire. Par ailleurs, le juge s’est attardé aux objectifs de dénonciation et de dissuasion, mais il a fait peu de cas des autres principes de détermination de la peine, dont celui d’harmonisation des peines. Or, s’il faut retenir, à la lumière de R. c. Bergeron (C.A., 2013-01-07), 2013 QCCA 7, SOQUIJ AZ-50925211, 2013EXP-229, J.E. 2013-119 — rendu postérieurement au jugement entrepris —, qu’il y a lieu de mettre l’accent sur les objectifs de dénonciation et de dissuasion, ce qui induit une sévérité grandissante quant aux peines imposées dans les cas de contacts sexuels, une certaine clémence n’est pas pour autant exceptionnelle lorsque les circonstances le justifient. En l’espèce, les gestes reprochés ne sont pas anodins, mais ils se situent nettement au bas de l’échelle de gravité, et le contexte ne présente pas le même niveau de réprobation que la très vaste majorité des cas jurisprudentiels soumis au juge de première instance. L’appelant est un candidat idéal à la réinsertion sociale et il y a lieu de de ne pas mettre celle-ci en péril; plus de sept années s’étant écoulées depuis la survenance des événements sans qu’aucun incident soit survenu. Dans les cas recensés pertinents au présent dossier, la peine imposée n’est jamais supérieure à 12 mois. Alors qu’aucun facteur aggravant inhabituel ne justifie de s’éloigner du bas de l’échelle pertinente, la peine de 15 mois est nettement déraisonnable, d’autant plus que le juge était en présence de plusieurs facteurs atténuants. Afin de permettre à l’appelant, notamment, de conserver l’emploi qu’il occupe depuis maintenant plusieurs années dans un nouveau secteur d’activités, des peines d’emprisonnement discontinu de 90 jours sous chacun des 7 chefs, à purger concurremment, sont appropriées. 5) Facteur aggravant: Les déclarations de victimes déposées au dossier n’étaient pas rédigées selon le formulaire prévu à la loi, mais l’appelant ne s’y est pas opposé au moment opportun et peut difficilement s’en plaindre étant donné le caractère informel de l’audience sur la peine. Cela dit, la difficulté ne réside pas tant dans le fait que le juge n’a utilisé le contenu de ces déclarations, mais dans les conclusions qu’il semble en avoir tirées alors que, traitant des facteurs aggravants, il a relevé les «conséquences victimologiques à long terme». Or, le «long terme» n’est pas partie de ces déclarations et il ne pouvait faire une telle inférence. Ce faisant, il a commis une erreur dans l’énoncé des facteurs aggravants. Par conséquent, une peine concurrente de 90 jours à purger de façon discontinue sous tous les chefs est substituée aux peines imposées. Les ordonnances sont maintenues.

Le texte intégral de la décision est disponible ici

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