Today

Summaries Sunday: SOQUIJ

Every week we present the summary of a decision handed down by a Québec court provided to us by SOQUIJ and considered to be of interest to our readers throughout Canada. SOQUIJ is attached to the Québec Department of Justice and collects, analyzes, enriches, and disseminates legal information in Québec.

ACTION COLLECTIVE (RECOURS COLLECTIF) : L’action collective au nom des personnes qui auraient été privées du statut d’Indien en raison de dispositions discriminatoires énoncées à la Loi sur les Indiens entre 1985 et 2011 est autorisée.

Intitulé : Sarrazin c. Canada (Procureur général), 2016 QCCS 2458
Juridiction : Cour supérieure (C.S.), Montréal, 500-06-000600-128
Décision de : Juge Marie-Anne Paquette
Date : 27 mai 2016

ACTION COLLECTIVE (RECOURS COLLECTIF) — procédure — autorisation — Indiens — reconnaissance du statut d’Indien — État — immunité — dispositions législatives déclarées inconstitutionnelles — recours en réparation — apparence de droit — questions communes — règle de la proportionnalité — représentativité du requérant — scission de l’instance — question préliminaire — saine administration de la justice.

PROCÉDURE CIVILE — nouveau Code de procédure civile.

Demande en autorisation d’exercer une action collective. Accueillie.

La Loi sur les Indiens a été adoptée en vertu de l’autorité législative exclusive du Parlement fédéral relativement aux Indiens et aux terres qui leur sont réservées. Cette loi crée notamment le registre des Indiens et régit l’identification et l’enregistrement de ces derniers. En 1985, en raison de l’avènement de la Charte canadienne des droits et libertés, des modifications à la Loi sur les Indiens ont été adoptées et sont entrées en vigueur rétroactivement au 17 avril 1985 (Loi modifiant la Loi sur les Indiens (L.C. 1985, c. 27)). Une nouvelle règle a alors été introduite en ce qui concerne la faculté de transmettre le statut d’Indien à la génération suivante, soit la «règle de la coupure à la deuxième génération», laquelle découle de l’effet combiné des articles 6 (1) a) et 6 (1) c) et de l’article 6 (2) de la Loi sur les Indiens tels qu’ils ont été modifiés. Ainsi, l’enfant de la troisième génération n’aura pas le statut d’Indien si sa grand-mère indienne a épousé un non-Indien, alors qu’il l’aurait si son grand-père indien avait épousé une non-Indienne. Le 6 avril 2009, dans McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), (C.A. (C.-B.), 2009-04-06 (décision rectifiée le 2009-06-03 et le 2009-07-13)), 2009 BCCA 153, SOQUIJ AZ-50548777, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a déclaré que les articles 6 (1) a) et 6 (1) c) de la Loi sur les Indiens tels qu’ils avaient été modifiés en 1985 violaient l’article 15 de la charte et que cette violation ne respectait pas le critère de l’atteinte minimale prévu à l’article 1 de la charte. La Cour a alors suspendu la déclaration d’inconstitutionnalité de ces dispositions de la Loi sur les Indiens afin de permettre au Parlement de modifier la loi, ce qui a été fait le 31 janvier 2011 par l’entrée en vigueur de la Loi sur l’équité entre les sexes relativement à l’inscription au registre des Indiens. Ces modifications comprennent notamment une disposition qui place l’État à l’abri de poursuites qui pourraient découler du fait qu’une personne a été privée du statut d’Indien avant leur entrée en vigueur. En l’espèce, le requérant désire être autorisé à exercer une action collective pour le compte de 45 000 personnes qui auraient été privées du statut d’Indien en raison de dispositions discriminatoires énoncées à la Loi sur les Indiens entre 1985 et 2011.

Décision

Quant au premier critère énoncé à l’article 575 du Code de procédure civile (C.P.C.), il est établi que, même si les circonstances varient d’un membre à l’autre, l’action collective pourra être autorisée si certaines questions sont communes. En fait, la seule présence d’une question de droit commune, connexe ou similaire est suffisante pour satisfaire à ce critère si celle-ci n’est pas insignifiante relativement au sort de l’action; elle n’a pas à être déterminante pour la solution de l’ensemble du litige. En l’espèce, la réponse aux questions communes portant sur l’inconstitutionnalité des amendements de 1985 à l’article 6 de la Loi sur les Indiens au regard de la charte et l’immunité de l’État ne dépend pas de la situation précise et personnelle de chacun des membres du groupe. En ce qui concerne le droit des membres du groupe à obtenir des dommages compensatoires, l’examen de cette question requerra une preuve, un débat et une analyse communs, au moins en partie, qui seront ensuite pertinents quant à l’examen des situations individuelles de ces derniers. En outre, il serait contraire au principe de la proportionnalité et à une saine administration de la justice d’exiger que cet examen complet soit refait systématiquement, peut-être par des décideurs différents, dans potentiellement 45 000 recours distincts. Le premier critère d’autorisation est donc rempli. D’autre part, malgré le sérieux de la défense d’immunité qu’invoque l’intimé, le tribunal ne peut conclure ici, sans amorcer l’analyse de la preuve, que les allégations de mauvaise foi, d’abus de droit ou de comportement clairement fautif de l’État sont incontestablement mal fondées. Ainsi, le deuxième critère prévu à l’article 575 C.P.C. est également rempli. Quant au troisième critère, il n’est pas contesté, compte tenu du nombre de personnes qui seraient membres du groupe. Enfin, il a été démontré que le requérant est en mesure d’assurer une représentation adéquate des membres. L’action collective est donc autorisée. Toutefois, pour la saine administration de la justice et dans le respect du principe de la proportionnalité, il est opportun de scinder l’instance afin que la question préliminaire déterminante de l’immunité de l’État soit tranchée dans un premier temps.

Le texte intégral de la décision est disponible ici

Comments are closed.