Summaries Sunday: SOQUIJ
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PÉNAL (DROIT) : La juge de première instance était fondée à rejeter la requête de l’appelant de «réopter» pour un procès devant juge et jury; l’enquête préliminaire avait pris fin conformément à l’article 549 C.Cr., et la requête avait été déposée après le délai de 15 jours accordé pour choisir un nouveau mode de procès sans le consentement de la poursuite.
Intitulé : Saitanis c. R., 2023 QCCA 1271
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal
Décision de : Juges Marie-France Bich, Patrick Healy et Stéphane Sansfaçon
Date : 5 octobre 2023
Résumé
PÉNAL (DROIT) — procédure pénale — procédure fédérale — choix du mode de procès — procès devant juge seul — choix du procès fait en l’absence de l’accusé — interprétation de l’article 536.2 C.Cr. — représentation par avocat — enquête préliminaire — renvoi à procès (art. 549 (1) C.Cr.) — compétence — juge — functus officio — droit à un nouveau choix (art. 561 (1) b) C.Cr.) — modification législative — absence de consentement de la poursuite — pouvoir discrétionnaire — absence d’abus — fraude — déclaration de culpabilité — appel — absence d’erreur.
PÉNAL (DROIT) — juridiction pénale — Cour du Québec — choix du mode de procès — procès devant juge seul — enquête préliminaire — renvoi à procès (art. 549 (1) C.Cr.) — compétence — juge — functus officio — droit à un nouveau choix (art. 561 (1) b) C.Cr.) — modification législative — absence de consentement de la poursuite — pouvoir discrétionnaire — absence d’abus — appel.
PÉNAL (DROIT) — infraction — opérations frauduleuses — fraude — investisseurs — franchise — restaurant — éléments constitutifs de l’infraction — actus reus — acte prohibé — acte malhonnête — privation — risque de préjudice — mens rea — connaissance subjective — lien de causalité — recevabilité de la preuve — message texte — preuve obtenue après les faits — valeur probante — pertinence — effet préjudiciable — déclaration de culpabilité — appel — absence d’erreur judiciaire (art. 686 (1) a) iii) C.Cr.) — caractère raisonnable du verdict.
PÉNAL (DROIT) — preuve pénale — recevabilité de la preuve — message texte — preuve obtenue après les faits — valeur probante — effet préjudiciable — pertinence — fraude — éléments constitutifs de l’infraction — pouvoir discrétionnaire — appel — absence d’erreur.
Appel d’une déclaration de culpabilité. Rejeté.
Accusé de fraude, l’appelant, par l’intermédiaire de son avocat, a choisi de subir son procès devant un juge de la Cour du Québec après la tenue d’une enquête préliminaire. Deux mois plus tard, les parties ont convenu de conclure l’enquête préliminaire conformément à l’article 549 (1) du Code criminel (C.Cr.), renvoyant ainsi l’appelant à procès. Le 29 août 2019, lors d’une conférence de facilitation, l’avocat de l’appelant a informé la poursuite et le juge du fait que ce dernier entendait «réopter» pour un procès devant juge et jury en vertu de l’ancien article 561 (1) b) C.Cr. La juge de première instance a rejeté cette requête parce que, selon elle, l’enquête préliminaire s’était terminée le 22 mai 2019 et que le délai de 15 jours prévu à cet article pour choisir un nouveau mode de procès avait expiré le 6 juin suivant. Après cette date, l’appelant ne pouvait réopter sans obtenir le consentement du poursuivant. L’appelant interjette appel de la déclaration de culpabilité ayant été prononcée par la juge.
Décision
M. le juge Healy: L’article 536.2 C.Cr. prévoit qu’un choix «peut être effectué par écrit sans que [le prévenu] ait à comparaître». Cette disposition permet une exception à la norme de la comparution personnelle de l’accusé au moment du choix initial, laquelle est conçue comme une mesure de protection au profit de ce dernier, et le principe énoncé dans Korponay c. P.G. du Canada (C.S. Can., 1982-01-26), SOQUIJ AZ-82111017, J.E. 82-131, [1982] 1 R.C.S. 41, doit pareillement s’appliquer de façon à permettre à celui-ci de renoncer à l’obligation de présenter un document écrit pour communiquer son choix s’il n’est pas présent devant le tribunal. Or, en l’espèce, l’appelant n’a pas effectué un choix par écrit conformément à l’article 536.2 C.Cr. D’ailleurs, il n’y a aucune raison de douter de la validité du choix effectué par l’appelant, lequel a été représenté par son avocat en son absence, de subir un procès devant un juge de la Cour du Québec après la tenue d’une enquête préliminaire.
La juge a eu raison de rejeter la requête de l’appelant visant à réopter sans le consentement de l’intimé. L’enquête préliminaire a bien pris fin le 22 mai 2019, soit après que l’appelant eut informé la Cour du Québec de sa décision de renoncer à terminer celle-ci en application de l’article 549 C.Cr. La décision de recourir à cette disposition a entraîné des conséquences immédiates: elle a mis fin à l’enquête préliminaire; l’accusé a été renvoyé à procès; et le juge qui présidait l’enquête est devenu dès lors functos officio et n’avait plus compétence pour continuer. L’enquête préliminaire ne pouvait survivre à la décision prise en vertu de l’article 549 et ne pouvait être maintenue, que ce soit provisoirement ou conditionnellement.
Toutefois, le droit de réopter à la fin de l’enquête préliminaire est resté ouvert durant 15 jours en vertu de l’ancien article 561 (1) b) C.Cr. Il ne s’agit pas d’une prolongation qui vise la durée de l’enquête préliminaire, mais plutôt le droit de choisir un nouveau mode de procès sans le consentement du poursuivant. En l’espèce, que l’appelant ait droit ou non à l’application rétroactive de la modification de l’article 561 C.Cr., laquelle est entrée en vigueur le 19 septembre 2021, sa requête visant à réopter pour un procès devant juge et jury excède le délai permis applicable, qu’il soit de 15 ou de 60 jours, puisqu’il a exprimé ce souhait plus de 90 jours après la fin de l’enquête préliminaire. Par ailleurs, l’appelant n’a démontré l’existence d’aucun élément abusif dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire de l’intimé de rejeter sa demande de réopter.
La juge n’a pas non plus erré en décidant de recevoir en preuve plusieurs messages texte ayant été transmis après la période visée dans l’acte d’accusation. Il n’existe aucune règle générale de droit selon laquelle la preuve obtenue après les faits est présumée irrecevable. En outre, les messages confirment que des actes malhonnêtes de supercherie et de dissimulation ont été commis et que l’appelant avait une conscience subjective du fait que ses actions mettraient à tout le moins les intérêts pécuniaires des victimes en péril. Ces messages sont donc non seulement pertinents, mais ils ont également une grande valeur probante quant aux éléments constitutifs de la fraude. Ainsi, l’appelant n’a pas démontré que la décision de la juge de ne pas exercer son pouvoir discrétionnaire pour exclure une preuve recevable était erronée, car il n’y avait pas de risque de préjudice qui contrebalançait la valeur probante des messages texte.
Enfin, l’appelant échoue à démontrer le caractère déraisonnable du verdict de culpabilité ou une interprétation erronée importante de la preuve qui pourrait être qualifiée d’erreur judiciaire.
Le texte intégral de la décision est disponible ici
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