Summaries Sunday: SOQUIJ
Every week we present the summary of a decision handed down by a Québec court provided to us by SOQUIJ and considered to be of interest to our readers throughout Canada. SOQUIJ is attached to the Québec Department of Justice and collects, analyzes, enriches, and disseminates legal information in Québec.
PÉNAL (DROIT) : En concluant que le public raisonnablement informé ne perdrait pas confiance dans l’administration de la justice si l’intimé, inculpé du meurtre au premier degré de ses deux enfants, était remis en liberté en attendant la tenue de son nouveau procès, le juge de première instance n’a commis aucune erreur de droit ni d’erreur manifeste et il a correctement exercé son pouvoir judiciaire.
Intitulé : R. c. Turcotte, 2014 QCCA 2190
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal, 500-10-005723-141
Décision de : Juges France Thibault, Guy Gagnon et Martin Vauclair
Date : 3 décembre 2014
PÉNAL (DROIT) — procédure pénale — procédure fédérale — remise en liberté — tenue d’un nouveau procès — meurtre au premier degré — victimes enfants de l’accusé — verdict de non-responsabilité criminelle en raison de troubles mentaux — confiance du public dans l’administration de la justice — personne raisonnable — revue de presse — interprétation de «public informé» — révision — cour d’appel — article 680 C.Cr. — norme d’intervention.
Requête en révision en vertu de l’article 680 du Code criminel (C.Cr.). Rejetée.
L’intimé a été accusé du meurtre au premier degré de ses deux enfants. En juillet 2011, un jury a prononcé un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux. Détenu à l’Institut Philippe-Pinel, l’intimé a été libéré le 12 décembre 2012, la commission d’examen ayant conclu que la sécurité du public ne commandait plus qu’il soit gardé dans un établissement hospitalier. Le 13 novembre 2013, la Cour d’appel a ordonné la tenue d’un nouveau procès. Le juge de la Cour supérieure a apprécié les quatre facteurs énumérés à l’alinéa 515 (10) c) C.Cr. et a conclu qu’un public raisonnablement informé ne perdrait pas confiance dans l’administration de la justice si l’intimé était remis en liberté en attendant son procès.
Décision
La jurisprudence canadienne est divisée en ce qui a trait à la norme d’intervention applicable à une cour d’appel appelée à réviser un jugement concernant une remise en liberté en vertu de l’article 680 (1) C.Cr. Au Québec, la Cour a opté pour la norme hybride. Il ressort de R. c. Coates (C.A., 2010-05-11), 2010 QCCA 919, SOQUIJ AZ-50635368, 2010EXP-1713, J.E. 2010-935, que la Cour accorde une grande déférence au juge de première instance en matière de détermination des faits même lorsqu’elle révise sa décision en vertu de l’article 680 C.Cr. C’est à tort que l’appelante prétend que le juge a haussé le standard de la personne raisonnable de façon que celle-ci doive être un juriste. Le juge a défini la «personne raisonnable» en prenant appui sur une abondante jurisprudence, dont St-Cloud c. R. (C.S., 2013-09-26), 2013 QCCS 5021, SOQUIJ AZ-51009868. Ces jugements font référence à un «public informé», c’est-à-dire un public en mesure de se former une opinion éclairée, en pleine connaissance des faits de la cause et du droit applicable, et qui n’est pas mû par la passion, mais par la raison. Le juge a exigé que l’opinion du public soit celle d’un public «informé» autant des circonstances réelles de l’affaire que des grands principes de droit applicables. L’interprétation du juge est sans faille. À cet égard, l’appelante a invité la Cour à considérer que l’opinion du public raisonnable se reflétait dans la revue de presse qu’elle avait déposée au soutien de sa demande de révision. Celle-ci comporte 21 coupures de journaux parus après le jugement de première instance. Or, ce faisant, l’appelante tente de laisser à l’humeur des opinions un rôle que le législateur a confié au juge. En l’espèce, c’est à bon droit que le juge a soupesé les moyens de défense de l’intimé pour décider de la force apparente de l’accusation. Le juge de première instance n’a pas commis d’erreur en considérant que l’intimé avait un moyen de défense valable à faire valoir au jury. Il a rappelé que l’intimé n’avait pas d’antécédents judiciaires et qu’il avait respecté les conditions de remise en liberté. Il s’en est tenu à la norme applicable, celle du public informé. En l’espèce, le public informé sait: que l’intimé bénéficie de la présomption d’innocence; que, pour être déclaré coupable d’un crime, l’intimé doit avoir été capable de former l’intention criminelle de la commettre; qu’il a une défense fondée sur les troubles mentaux à présenter; qu’il jouit de la protection constitutionnelle de ne pas être privé de liberté sans juste cause; tient pour acquis que la détention de l’intimé n’est pas nécessaire pour assurer sa présence à son procès ni pour assurer la protection et la sécurité du public; et que, si l’intimé est déclaré coupable des crimes dont il est accusé ou d’une infraction incluse, il purgera, à ce moment, la peine imposée. Le juge n’a commis aucune erreur de droit ni d’erreur manifeste et il a correctement exercé son pouvoir judiciaire. La requête en révision est mal fondée en fait et en droit.
Le texte intégral de la décision est disponible ici




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