Summaries Sunday: SOQUIJ
Every week we present the summary of a decision handed down by a Québec court provided to us by SOQUIJ and considered to be of interest to our readers throughout Canada. SOQUIJ is attached to the Québec Department of Justice and collects, analyzes, enriches, and disseminates legal information in Québec.
PÉNAL (DROIT) : Reconnu coupable de fraude, de complot pour fraude et d’abus de confiance, l’ancien maire de Boisbriand Robert Poirier est condamné à une peine d’emprisonnement de 18 mois.
Intitulé : Directeur des poursuites criminelles et pénales du Québec c. Poirier,
2016 QCCQ 3775
Juridiction : Cour du Québec, Chambre criminelle et pénale (C.Q.), Terrebonne (Saint-Jérôme), 700-01-101736-117
Décision de : Juge Normand Bonin
Date : 20 mai 2016
PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — opérations frauduleuses — fraude — gouvernement — complot — maire — stratagème — partage des contrats — attribution de contrats à des bureaux d’ingénieurs — versement de sommes d’argent à un parti politique — accusé âgé de 56 ans — absence d’antécédents judiciaires — abus de confiance — revue de la jurisprudence — cas inapproprié au prononcé d’une peine d’emprisonnement à purger au sein de la collectivité — dissuasion générale et spécifique — réprobation sociale — détention — probation.
PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — infractions dans l’application de la loi et l’administration de la justice — corruption — abus de confiance — peine concurrente.
Prononcé de la peine.
L’accusé a été reconnu coupable sous deux chefs de fraude (art. 380 (1) a) du Code criminel (C.Cr.)) et de complot pour fraude (art. 465 (1) c) C.Cr.) ainsi que sous un chef d’abus de confiance (art. 122 C.Cr.) commis durant la période où il était maire de la Ville de Boisbriand, soit entre le 1er janvier 2000 et le 12 juillet 2005. Alors qu’il exerçait les fonctions de maire, avec la complicité de son organisateur politique et de représentants de bureaux d’ingénieurs, il a participé à l’installation et au maintien de stratagèmes de collusion et de corruption pour contourner la loi, les règles d’éthique et les processus d’adjudication des contrats, de façon à organiser le partage des contrats provenant de la municipalité entre différents bureaux d’ingénieurs choisis par lui. Ces derniers étaient des commanditaires majeurs pour les activités de Boisbriand et celles du parti municipal de l’accusé. Les fonds amassés allaient soit directement au parti ou à des organismes caritatifs choisis par l’accusé et l’organisateur de son parti. Leur participation financière était une obligation et le seul moyen d’obtenir, en fait, une part des contrats de la municipalité. Alors que la poursuite réclame une peine de 26 mois à 6 ans de pénitencier, la défense suggère une peine d’emprisonnement à purger au sein de la communauté.
Décision
Il est impossible d’établir hors de tout doute raisonnable la perte pécuniaire subie en raison de l’absence de concurrence et du fait pour la municipalité d’être privée de la meilleure offre. La fraude a entraîné pour la municipalité des pertes de centaines de milliers de dollars. Quant au degré de préméditation, les accusations s’échelonnent sur cinq ans. Le stratagème de fraude comportait un certain niveau de complexité puisqu’il requérait l’entente entre plusieurs bureaux d’ingénieurs et divers fonctionnaires. L’accusé ne reconnaît pas son crime et n’a pas de remords, et ses explications visant à justifier les faveurs reçues ne sont pas crédibles. Le discours de banalisation dont il s’est constamment servi pour laisser entendre que sa pratique était légale favorise l’émergence d’une culture de déviance et de transgression des règles établies tout en cherchant à maintenir auprès de l’opinion publique une image favorable. Il n’a effectué aucun remboursement et n’a démontré aucune intention de le faire. Âgé de 56 ans et père de 3 filles majeures, il n’a pas d’antécédents judiciaires et affiche un faible risque de récidive. Malgré toute la médiatisation de ces accusations, il a réussi à maintenir un certain niveau d’emploi. Enfin, il y a lieu de tenir compte de l’importance des délais écoulés, soit 10 ans entre la fin de la commission des crimes et le prononcé de la peine. Parmi les facteurs aggravants se trouvent l’abus de confiance répété, l’importance, la complexité et la durée du stratagème ainsi que le préjudice financier causé à la collectivité. Cela dit, une peine de pénitencier n’est pas appropriée. Par ailleurs, l’abus de confiance commis par une personne dont la société requiert, par sa législation même, un haut niveau de probité doit être dénoncé et, de ce fait, l’emprisonnement avec sursis n’est pas non plus approprié en l’espèce. Le message de dissuasion doit être sans équivoque. La collusion et la corruption constituent une culture criminelle et les conséquences ont été majeures pour les citoyens de Boisbriand. Les manoeuvres de l’accusé ont contribué à miner les fondements démocratiques de la société et à installer un discrédit majeur sur le fonctionnement des administrations publiques. Les objectifs de dissuasion spécifique et générale doivent primer l’objectif de réhabilitation. L’accusé ne bénéficie d’aucun des facteurs d’atténuation de la peine se trouvant dans R. c. Berniquez St-Jean (C.Q., 2014-09-09), 700-01-127016-148, R. c. Zambito(C.Q., 2015-11-10), 2015 QCCQ 10999, SOQUIJ AZ-51229073, 2015EXP-3299, J.E. 2015-1830, et R. c. Zambito (C.Q., 2015-11-10), 2015 QCCQ 11687, SOQUIJ AZ-51233619; les autres jugements cités où une peine d’emprisonnement avec sursis a été prononcée ne trouvent pas application non plus. La peine doit refléter la réprobation sociale. Par conséquent, l’accusé est condamné à 18 mois de détention, assortis d’une probation de 3 ans. Il devra payer la suramende compensatoire sous chacun des chefs d’accusation.
Le texte intégral de la décision est disponible ici
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