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Summaries Sunday: SOQUIJ

Every week we present the summary of a decision handed down by a Québec court provided to us by SOQUIJ and considered to be of interest to our readers throughout Canada. SOQUIJ is attached to the Québec Department of Justice and collects, analyzes, enriches, and disseminates legal information in Québec.

PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE : Point Zero doit notamment restituer les profits illicites réalisés grâce à la violation de la marque de commerce de Diesel, soit 52 080 $.

Intitulé : Diesel, s.p.a. c. Benisti Import-Export inc., 2016 QCCS 1085
Juridiction : Cour supérieure (C.S.), Montréal, 500-17-060891-101
Décision de : Juge Florence Lucas
Date : 14 mars 2016

PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE — marque de commerce — vêtements — jeans — confusion — concurrence déloyale — dommages-intérêts — dommages punitifs — injonction permanente.

COMPAGNIES — administrateur — responsabilité personnelle — contrefaçon — marque de commerce — concurrence déloyale — vêtements — jeans — étiquette.

RESPONSABILITÉ — responsabilité du fait personnel — administrateur — contrefaçon — marque de commerce — concurrence déloyale — vêtements — jeans — étiquette.

DROITS ET LIBERTÉS — droits et libertés fondamentaux — jouissance paisible des biens — marque de commerce — contrefaçon — concurrence déloyale — atteinte illicite et intentionnelle — dommages-intérêts — dommages punitifs — injonction permanente.

DOMMAGE (ÉVALUATION) — dommage exemplaire ou dommage punitif — jouissance paisible des biens — atteinte illicite et intentionnelle — contrefaçon — marque de commerce — concurrence déloyale.

Requête en injonction permanente et en réclamation de dommages-intérêts, de dommages punitifs et d’honoraires extrajudiciaires. Accueillie en partie (92 080 $).

Dans les années 1980, Diesel, soit Diesel, s.p.a. et sa filiale canadienne Diesel Canada inc., a créé une griffe pour ses jeans, en l’occurrence une étiquette blanche cousue en diagonale sur la petite poche avant droite, superposant la marque «Diesel Industry» sur «DENIM DIVISION», avec à l’extrême droite un logo rouge rectangulaire de la lettre «D» de Diesel («Pocket Design»). Elle a apposé cette griffe sur la quasi-totalité de ses styles de jeans, mais également sur les poches d’autres types de vêtements pour distinguer visuellement tous les produits Diesel. En 2004, Benisti Import-Export inc. (faisant affaire sous le nom Point Zero) a déposé une demande d’enregistrement pour une nouvelle marque POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, en déclarant que celle-ci était employée au Canada depuis 1999. Il s’agissait d’une étiquette blanche cousue en diagonale sur la petite poche avant droite de ses jeans, superposant la marque «Point Zero Co.» sur les mots «DENIM DIVISION», avec à l’extrême droite un logo rouge rectangulaire de la lettre «P» de Point Zero. De façon concomitante, Diesel a déposé trois demandes d’enregistrement de marques de commerce, pour des étiquettes placées en diagonale sur la petite poche avant droite de ses jeans, dont notamment le Pocket Design représenté dans la demande d’enregistrement de la marque DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN. La demande d’enregistrement de la marque POINT ZERO CO. DENIM DIVISION a été approuvée et publiée au «Journal des marques de commerce» en janvier 2007. Toutefois, Diesel s’est opposée à la demande de Point Zero au motif que la marque convoitée créait de la confusion avec les marques de commerce et Point Zero n’a pas produit de contre-déclaration ni de preuve dans le délai prescrit; sa demande a été réputée abandonnée en 2009. Point Zero a toutefois commercialisé deux styles de jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, d’où le présent recours. En janvier 2010, les défendeurs ont pris l’engagement définitif, sans admission, de s’abstenir de fabriquer et de vendre les jeans visés par l’injonction ou de cesser de le faire, avec l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, qu’ils ont remplacée par un logo bleu circulaire de la lettre «P» de Point Zero.

Décision
La violation du droit à l’usage exclusif de la marque de commerce existe lorsqu’une personne qui n’est pas autorisée à employer la marque déposée fabrique, vend, distribue ou annonce «des produits ou services en liaison avec une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion» (art. 20 de la Loi sur les marques de commerce). Il incombait à Diesel de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la confusion était susceptible de survenir entre sa marque de commerce et l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, selon les critères prévus à l’article 6 de la loi. Or, les deux étiquettes comportent certaines différences, mais elles véhiculent la même idée par leur design identique et unique, ce qui engendre une probabilité de confusion, et la marque POINT ZERO CO. ne suffit pas pour dissiper toute confusion. Il y a donc violation du droit exclusif de Diesel à l’emploi de la marque de commerce DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN depuis la date de dépôt de la demande d’enregistrement, le 15 février 2005. Quant à la concurrence déloyale, Diesel a établi de façon prépondérante que le Pocket Design, en tout temps pertinent quant aux présentes, était suffisamment connu et distinctif pour avoir acquis une clientèle protégeable. De plus, il paraît clair que, soit par insouciance, soit pour délibérément confondre le consommateur, Point Zero a fabriqué et commercialisé des jeans avec l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION qui constitue une copie quasi identique du Pocket Design de Diesel et sème la confusion. Enfin, Diesel a démontré par probabilité l’existence de dommages découlant de la commercialisation d’une étiquette trompeuse sur les jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION. Le défendeur Benisti, président fondateur et administrateur unique de la société défenderesse, n’a pas engagé sa responsabilité personnelle par le seul fait d’avoir participé, à l’origine, à la conception de l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION. La preuve ne révèle rien de clair à cet égard puisque des concepteurs de Point Zero ont travaillé à l’étiquette et pourraient être à l’origine de la contrefaçon. Toutefois, sachant que la commercialisation des jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION risquait de contrevenir à une marque déposée et d’engager la responsabilité de son entreprise, Benisti devait faire preuve de prudence et s’assurer de la légalité de sa propre marque et de son usage. S’il désirait continuer à l’utiliser, dans les circonstances, il devait aller au bout de la procédure d’opposition. En poursuivant la commercialisation de ses produits litigieux, Benisti a pris une décision fautive, entraînant sa responsabilité extracontractuelle. Quant aux dommages, le montant des revenus bruts découlant de la vente des jeans par Point Zero s’établit à 104 160 $ et, compte tenu d’une marge de profit de 50 %, les profits s’élèvent à 52 080 $. Seule Point Zero est condamnée à verser cette somme car, si l’on considère que la restitution des profits prévue à l’article 53.2 de la loi vise à empêcher le défendeur de conserver des gains illicites, Benisti ne peut être tenu responsable des gains de Point Zero. Par ailleurs, la violation d’une marque de commerce constitue une violation au «droit à la jouissance paisible et à la libre disposition de ses biens» prévu à l’article 6 de la Charte des droits et libertés de la personne, ce qui donne ouverture à l’attribution de dommages punitifs en cas d’atteinte illicite et intentionnelle. Les dommages punitifs ne peuvent s’attribuer sur une base solidaire et, en l’espèce, chacun des défendeurs est condamné à verser 20 000 $. La réclamation visant les honoraires extrajudiciaires est rejetée, en l’absence d’abus de procédure.

Le texte intégral de la décision est disponible ici

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