Summaries Sunday: SOQUIJ
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COMPAGNIES : La juge de première instance a erré, un tribunal ne devant pas, sauf circonstances exceptionnelles, permettre à l’actionnaire majoritaire d’acquérir sans contrepartie les actions de l’actionnaire minoritaire.
Intitulé : Li c. Wang, 2016 QCCA 641
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal, 500-09-024834-145
Décision de : Juges Julie Dutil, Dominique Bélanger et Étienne Parent
Date : 12 avril 2016
COMPAGNIES — protection des intérêts minoritaires — recours en oppression — rachat d’actions — évaluation d’entreprise — dette à long terme — valeur nulle — valeur marchande — attentes raisonnables.
PROCÉDURE CIVILE — jugement — jugement rectificatif — functus officio — évaluation d’entreprise — modification de la méthode de calcul — modification des motifs.
PREUVE — aveu — aveu judiciaire — amendement — absence d’opposition — nécessité d’une preuve d’erreur de fait.
Appels d’un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli en partie un recours en oppression et une demande reconventionnelle. Appel principal accueilli; appel incident rejeté.
Le jour même où il a racheté pour la somme de 399 000 $ les actions que son ancien partenaire détenait dans les sociétés mises en cause, l’appelant les a revendues à l’intimé en y ajoutant une partie des siennes, si bien que celui-ci, en échange de 660 000 $, a acquis le statut d’actionnaire majoritaire. Les relations entre les deux actionnaires ont dégénéré rapidement, d’où le recours en oppression et en dommages-intérêts intenté par l’appelant et la demande reconventionnelle que lui a opposée l’intimé. Celui-ci consentant à racheter les actions de l’appelant, la juge de première instance les a évaluées à 369 900 $, dont elle a soustrait une somme de 50 000 $ qu’elle a accordée à l’intimée à titre de dommages-intérêts. Deux jours après avoir rendu cette décision, la juge a produit un jugement rectifié dans lequel, estimant qu’elle avait omis de tenir compte de la dette à long terme, elle a rajusté la valeur des actions à 0 $, d’où le présent appel. Dans l’éventualité où la Cour déterminerait que la juge ne pouvait rectifier son jugement initial, l’intimé s’est porté appelant incident de bene esse afin de contester la valeur retenue dans sa décision initiale.
Décision
La rectification de jugement est une exception à la règle de l’irrévocabilité des jugements. Lorsqu’un décideur a épuisé sa compétence, il ne peut par la suite revenir sur sa décision. En l’espèce, la juge n’a pas seulement corrigé une erreur de calcul: elle a modifié ses motifs et sa méthode de calcul, ce qu’elle ne pouvait pas faire.
Par ailleurs, obliger l’intimé à se départir de ses actions sans contrepartie est une solution déraisonnable et inéquitable, qui ne reflète ni la valeur marchande de celles-ci ni les attentes légitimes des parties. La mesure de redressement accordée, à l’occasion d’un recours en oppression, doit rectifier l’injustice ou l’oppression, sans donner au plaignant plus que ce à quoi il pouvait s’attendre. En l’espèce, la preuve la plus probante de la valeur marchande des actions est le prix auquel l’appelant a acquis celles de son ancien partenaire. En plus d’être concomitante de la date à laquelle les actions doivent être évaluées, il s’agit de la valeur reconnue par l’intimé dès le début du litige. En effet, l’amendement par lequel celui-ci a retiré de sa demande reconventionnelle les passages où cette valeur est admise n’a pas eu pour effet de révoquer l’aveu que ceux-ci constituent. À cet égard, contrairement à un certain courant jurisprudentiel, le fait pour une partie de ne pas s’opposer à un amendement n’assouplit pas la règle établie à l’article 2852 du Code civil du Québec, qui assujettit la révocation d’un aveu fait en cours d’instance à la preuve d’une erreur de fait. Or, en l’espèce, l’intimé ne s’est pas conformé à cette exigence.
Le texte intégral de la décision est disponible ici
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