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Summaries Sunday: SOQUIJ

Every week we present the summary of a decision handed down by a Québec court provided to us by SOQUIJ and considered to be of interest to our readers throughout Canada. SOQUIJ is attached to the Québec Department of Justice and collects, analyzes, enriches, and disseminates legal information in Québec.

CONSTITUTIONNEL (DROIT) : La conclusion voulant qu’une inscription commerciale rédigée seulement en anglais ou en anglais et en français mais dont les lettres sont du même format constitue une violation importante de la Charte de la langue française, tant à l’égard du critère législatif de la «nette prédominance» qu’à l’égard de l’objectif de la loi d’assurer un visage linguistique correspondant à la prédominance de la langue française, n’est pas déraisonnable.

Intitulé : 156158 Canada inc. c. Québec (Attorney General), 2016 QCCS 1676 *
Juridiction : Cour supérieure (C.S.), Montréal, 500-36-007519-153 et autres
Décision de : Juge Claudine Roy
Date : 12 avril 2016

CONSTITUTIONNEL (DROIT) — langue — langue d’affichage — infraction pénale — Charte de la langue française — articles 51, 52 et 58 — constitutionnalité — publicité — affichage bilingue sans prédominance du français — publications et inscriptions sur des produits ou dans les sites Web en anglais uniquement — liberté d’expression — jouissance paisible des biens — discrimination — droit à l’égalité.

PÉNAL (DROIT) — infraction — autres infractions pénales — Charte de la langue française — articles 51, 52 et 58 — constitutionnalité — publicité — affichage bilingue sans prédominance du français — publications et inscriptions sur des produits ou dans les sites Web en anglais uniquement — liberté d’expression — jouissance paisible des biens — discrimination — droit à l’égalité.

DROITS ET LIBERTÉS — droit à l’égalité — motifs de discrimination — langue — Charte de la langue française — articles 51, 52 et 58 — constitutionnalité — publicité — affichage bilingue sans prédominance du français — publications et inscriptions sur des produits ou dans les sites Web en anglais uniquement — liberté d’expression — jouissance paisible des biens.

DROITS ET LIBERTÉS — droits et libertés fondamentaux — pensée, opinion et expression — liberté d’expression — infraction pénale — Charte de la langue française — articles 51, 52 et 58 — constitutionnalité — publicité — affichage bilingue sans prédominance du français — publications et inscriptions sur des produits ou dans les sites Web en anglais uniquement — atteinte raisonnable.

DROITS ET LIBERTÉS — droits et libertés fondamentaux — jouissance paisible des biens —Charte de la langue française — articles 51, 52 et 58 — constitutionnalité — publicité — affichage bilingue sans prédominance du français — publications et inscriptions sur des produits ou dans les sites Web en anglais uniquement — atteinte raisonnable.

Appel d’un jugement ayant déclaré les appelantes coupables d’avoir contrevenu aux dispositions de la Charte de la langue française. Rejeté.

Le juge de première instance a conclu que la langue française ne figurait pas de façon prédominante dans l’affichage public et la publicité commerciale des appelantes et que les publications ainsi que les inscriptions sur des produits ou sur leurs sites Web étaient en anglais uniquement, contrairement aux dispositions des articles 51, 52 et 58 de la Charte de la langue française. Ces dernières soutiennent que le juge a erré en rejetant leurs arguments voulant que ces dispositions soient inconstitutionnelles puisqu’elles violeraient leur droit à la liberté d’expression (art. 2 b) de la Charte canadienne des droits et libertés et art. 3 de la Charte des droits et libertés de la personne), leur droit à l’égalité (art. 15 de la charte canadienne et art. 10 de la charte québécoise), leur droit à la liberté (art. 7 de la charte canadienne et art. 1 de la charte québécoise) ainsi que leur droit à la jouissance paisible et à la libre disposition de leurs biens (art. 6 de la charte québécoise). De plus, l’une des appelantes prétend que son affichage dans son ensemble satisfait aux critères de la «nette prédominance» et, subsidiairement, que la contravention est si peu importante que le juge aurait dû appliquer la règle de minimis non curat lex, laquelle aurait justifié un acquittement. Par ailleurs, ce dernier a conclu que la protection de la langue française était encore un important objectif et que les mesures législatives adoptées satisfaisaient au test établi dans R. c. Oakes (C.S. Can., 1986-02-28), SOQUIJ AZ-86111022, J.E. 86-272, [1986] 1 R.C.S. 103, [1986] D.L.Q. 270 (rés.). Il a décidé que les appelantes ne s’étaient pas déchargées du fardeau de prouver que la situation de la langue française avait changé de manière considérable depuis les décisions rendues dans Ford c. Québec (Procureur général), (C.S. Can., 1988-12-15), SOQUIJ AZ-89111009, J.E. 89-30, [1988] 2 R.C.S. 712, et Devine c. Québec (Procureur général), (C.S. Can., 1988-12-15), SOQUIJ AZ-89111019, J.E. 89-31, [1988] 2 R.C.S. 790.

Décision
La conclusion voulant qu’une inscription commerciale rédigée seulement en anglais ou bilingue mais dont les lettres sont du même format constitue une violation importante de la loi, tant à l’égard du critère législatif de la «nette prédominance» qu’à l’égard de l’objectif de la loi d’assurer un visage linguistique correspondant à la prédominance de la langue française, n’est pas déraisonnable. De la même manière, il n’est pas déraisonnable de conclure que la règle de minimis non curat lex ne peut être opposée à cette violation. En ce qui concerne le droit à la liberté d’expression, contrairement aux prétentions des appelantes, le juge de première instance n’a pas erré en droit et n’a pas estimé que l’obiter dictum dans Ford signifie que seule l’exigence d’une «nette prédominance» pourrait satisfaire au test d’une atteinte minimale à ce droit. De plus, le juge était contraint d’appliquer l’arrêt Entreprises WFH ltée c. Québec (Procureure générale), (C.A., 2001-10-24), SOQUIJ AZ-50103084, J.E. 2001-2034, [2001] R.J.Q. 2557, à titre de précédent. En ce sens, il a bien appliqué le principe de la stare decisis. La véritable question en l’espèce était de savoir s’il y avait suffisamment de preuves permettant de se démarquer des précédents, ce qui n’était pas le cas. En ce qui a trait au visage linguistique du Québec, la législation ne fait aucune distinction fondée sur la visibilité de l’inscription à partir de la voie publique et le juge était donc fondé à ne pas en tenir compte. Quant à la vulnérabilité de la langue française, les appelantes n’ont pas produit de preuve démontrant que la situation de la langue française avait changé de façon considérable depuis Ford et Devine, qui indiquaient alors que l’anglais était dominant dans le domaine économique. Pour les mêmes motifs, le juge n’a commis aucune erreur de droit non plus dans son analyse relativement au droit à l’égalité, car la Charte de la langue française ne contient aucune disposition portant atteinte à la dignité humaine des anglophones. En outre, de la même manière que le droit à la liberté d’expression, le droit à la liberté et le droit à la jouissance paisible de son bien, le droit à l’égalité peut être restreint par une règle de droit dans des limites qui sont raisonnables (art. 1 de la charte canadienne et art. 9.1 de la charte québécoise). Par ailleurs, le juge n’a commis aucune erreur en affirmant que les contraintes imposées par la Charte de la langue française sur la façon dont les appelantes mènent leurs affaires ne peuvent être qualifiées de fondamentalement personnelles. Ce droit vise à protéger les êtres humains et non les personnes morales.

Le texte intégral de la décision est disponible ici

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