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Summaries Sunday: SOQUIJ

Every week we present the summary of a decision handed down by a Québec court provided to us by SOQUIJ and considered to be of interest to our readers throughout Canada. SOQUIJ is attached to the Québec Department of Justice and collects, analyzes, enriches, and disseminates legal information in Québec.

PÉNAL (DROIT) La juge de première instance a commis une erreur en faisant reposer l’abus des procédures sur l’atteinte à l’équité du procès en raison de la simple substitution des accusations portées contre l’intimée; il y a lieu d’ordonner la tenue d’un nouveau procès.

Intitulé : R. c. Dumont-Chamberland, 2017 QCCA 428
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal, 500-10-006054-157
Décision de : Juges Martin Vauclair, Geneviève Marcotte et Marie-Josée Hogue
Date : 21 mars 2017

PÉNAL (DROIT) — procédure pénale — procédure fédérale — arrêt des procédures — chef d’accusation — modification — rejet — nouvelle sommation par voie de mise en accusation — droit d’être jugé dans un délai raisonnable — préjudice — absence de violation de l’article 11 b) de la Charte canadienne des droits et libertés — équité du procès — abus de procédure — catégorie résiduelle — atteinte à l’intégrité du système de justice — erreur de droit — tenue d’un nouveau procès.

PÉNAL (DROIT) — garanties fondamentales du processus pénal — droit d’être jugé dans un délai raisonnable — chef d’accusation — modification — rejet — nouvelle sommation par voie de mise en accusation — préjudice — absence de violation de l’article 11 b) de la Charte canadienne des droits et libertés — abus de procédure — équité du procès — catégorie résiduelle — atteinte à l’intégrité du système de justice — erreur de droit — tenue d’un nouveau procès.

DROITS ET LIBERTÉS — droits judiciaires — personne arrêtée ou détenue — droit d’être jugé dans un délai raisonnable — chef d’accusation — modification — rejet — nouvelle sommation par voie de mise en accusation — préjudice — absence de violation de l’article 11 b) de la Charte canadienne des droits et libertés — abus de procédure — équité du procès — catégorie résiduelle — atteinte à l’intégrité du système de justice — erreur de droit — tenue d’un nouveau procès.

DROITS ET LIBERTÉS — droits judiciaires — vie, sûreté, intégrité et liberté — droit d’être jugé dans un délai raisonnable — chef d’accusation — modification — rejet — nouvelle sommation par voie de mise en accusation — préjudice — absence de violation de l’article 11 b) de la Charte canadienne des droits et libertés — abus de procédure — équité du procès — catégorie résiduelle — atteinte à l’intégrité du système de justice — erreur de droit — tenue d’un nouveau procès.

Appel d’un jugement ayant prononcé un arrêt des procédures. Accueilli; la tenue d’un nouveau procès est ordonnée.

Interpellée par les policiers alors qu’elle conduisait son automobile, l’intimée a refusé d’obéir à un ordre. Elle a été accusée par voie sommaire d’avoir refusé de fournir un échantillon d’haleine au moyen d’un appareil de détection approuvé. Lors du procès, la poursuite a voulu modifier le chef d’accusation afin qu’il soit plutôt reproché à l’intimée d’avoir refusé de suivre le policier pour subir un alcootest. Le juge a refusé la modification et la poursuite a été autorisée à retirer l’accusation. Quarante jours plus tard, elle a fait délivrer à l’intimée une sommation reprochant, par voie de mise en accusation cette fois, un chef d’accusation conforme à la modification qu’elle avait demandée. Au procès, l’intimée a présenté deux requêtes, soit une demandant un arrêt des procédures pour cause de délai déraisonnable et une autre alléguant un abus de procédure. La juge a rejeté la première, mais elle a accueilli la seconde et a prononcé l’arrêt des procédures. La juge a conclu que l’abus de procédure découlait en grande partie du temps écoulé depuis les premières accusations. Elle s’est dite d’avis que le cheminement du dossier avait contribué au préjudice subi par l’intimée et que l’arrêt des procédures était l’unique façon de mettre un terme à celui-ci.

Décision

M. le juge Vauclair: Selon une jurisprudence constante de la Cour suprême sur l’interaction entre l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés et les garanties précises énoncées aux articles 8 à 14, le principe de la cohérence fait en sorte que l’article 7 offre une protection résiduaire aux garanties précises, mais il ne peut s’y substituer. En l’espèce, le préjudice invoqué était exclusivement lié aux délais et les décisions semblent contradictoires. Une fois qu’elle a conclu que le délai était raisonnable, la juge a arrêté son analyse et est passée à l’examen de la même situation sous l’angle de l’abus de procédure. Or, on ne peut conclure à l’absence de violation de l’article 11 b) de la charte pour ensuite conclure à une violation de l’article 7 en raison de faits générateurs de la violation et de circonstances identiques. Il s’agit là d’une erreur. En l’espèce, la requête fondée sur l’article 11 b) de la charte a échoué. Quant à l’abus de procédure, il s’agit de suivre l’enseignement de la Cour suprême dans R. c. Babos (C.S. Can., 2014-02-21), 2014 CSC 16, SOQUIJ AZ-51046916, 2014EXP-660, J.E. 2014-343, [2014] 1 R.C.S. 309. Or, la juge a eu raison de dire que le retrait d’une dénonciation suivi du dépôt d’une seconde peut parfois être abusif. Cependant, dans la mesure où la modification est possible, la substitution ne peut être, en soi, abusive. Aussi, en concluant que l’équité du procès était atteinte uniquement en raison du retrait de la dénonciation au procès et de la substitution d’une nouvelle accusation, la juge a commis une erreur fatale puisque l’abus repose sur cette conclusion. Cela dit, l’équité du procès n’étant pas en cause, il reste à déterminer si la catégorie résiduelle de l’abus de procédure entre en jeu, à savoir l’abus qui porte atteinte à l’intégrité du système de justice. Or, en l’espèce, l’ensemble des circonstances ne peut être qualifié d’abus de procédure et entraîner le remède exceptionnel en cause. La précipitation, le manque de jugement dans la conduite du dossier et l’erreur ne sont pas nécessairement générateurs des abus de procédure relevant de la catégorie résiduelle. Ainsi que l’enseigne la Cour suprême dans Babos, «il s’agit de savoir si l’État a adopté une conduite choquant le sens du franc-jeu et de la décence de la société et si la tenue d’un procès malgré cette conduite serait préjudiciable à l’intégrité du système de justice» (paragr. 35). Rien de tel n’a été démontré. Enfin, une autre erreur s’ajoute, à savoir l’omission de la juge de mettre en balance les intérêts en jeu, une étape nécessaire et qui comporte un lourd fardeau pour la personne qui recherche un arrêt des procédures. Par conséquent, la juge a commis une erreur en faisant reposer l’abus de procédure sur l’atteinte à l’équité du procès en raison de la simple substitution d’accusations. Vu sous l’angle de la catégorie résiduelle, une conclusion d’abus de procédure dans les circonstances ne peut se justifier en droit.

Le texte intégral de la décision est disponible ici

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