Summaries Sunday: SOQUIJ
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PÉNAL (DROIT) : La Cour rejette l’appel du verdict de culpabilité prononcé à l’endroit de la belle-mère de la «fillette de Granby» et l’appel de l’ordonnance ayant porté à 13 ans la période préalable à l’admissibilité à la libération conditionnelle.
Intitulé : A c. R., 2025 QCCA 300
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Québec
Décision de : Juges François Doyon, Michel Beaupré et Myriam Lachance
Date : 17 mars 2025
Résumé
PÉNAL (DROIT) — infraction — infractions contre la personne — meurtre — meurtre au second degré — procès devant jury — victime âgée de 7 ans — accusée belle-mère — asphyxie — mode de commission de l’infraction — article 229 c) C.Cr. — fin illégale — séquestration — acte dangereux distinct — apposer du ruban adhésif — dangerosité — prévisibilité des conséquences — connaissance subjective — aveuglement volontaire — absence d’état de panique — directives du juge au jury — déduction conforme au bon sens — recevabilité de la preuve — messages texte — animosité — preuve de mauvais caractère — exclusion de la preuve — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — critères établis dans R. c. Grant (C.S. Can., 2009-07-17), 2009 CSC 32, SOQUIJ AZ-50566222, J.E. 2009-1379, [2009] 2 R.C.S. 353 — déclaration de culpabilité — appel.
PÉNAL (DROIT) — preuve pénale — exclusion de la preuve — messages texte — téléphone cellulaire — mandat de perquisition — télémandat — validité — dénonciation — suffisance des motifs — portée — exécution — fouille accessoire à la détention à des fins d’enquête — fouille accessoire à une arrestation subséquente concomitante — fouille sans mandat — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — violation des droits constitutionnels — critères établis dans R. c. Grant (C.S. Can., 2009-07-17), 2009 CSC 32, SOQUIJ AZ-50566222, J.E. 2009-1379, [2009] 2 R.C.S. 353 — recevabilité de la preuve — animosité — preuve de mauvais caractère — pertinence — animus — mobile — dynamique familiale — absence de preuve de propension — valeur probante — effet préjudiciable — fin illégale — insouciance — aveuglement volontaire — directives du juge au jury — déduction conforme au bon sens — meurtre au second degré — séquestration — appel.
PÉNAL (DROIT) — procédure pénale — procédure fédérale — appel — procès devant jury — directives du juge au jury — mode de commission de l’infraction — meurtre au second degré — article 229 c) C.Cr. — fin illégale — séquestration — acte dangereux distinct — apposer du ruban adhésif — dangerosité — prévisibilité des conséquences — recevabilité de la preuve — animosité — preuve de mauvais caractère — pertinence — animus — mobile — dynamique familiale — absence de preuve de propension — valeur probante — effet préjudiciable — connaissance subjective — conséquences probables de l’acte dangereux — aveuglement volontaire — absence d’état de panique — déduction conforme au bon sens — changement de district (art. 599 C.Cr.) — pouvoir discrétionnaire — absence de préjudice.
DROITS ET LIBERTÉS — droits judiciaires — protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — exclusion de la preuve — messages texte — téléphone cellulaire — mandat de perquisition — télémandat — validité — dénonciation — suffisance des motifs — portée — exécution — fouille accessoire à la détention à des fins d’enquête — fouille accessoire à une arrestation subséquente concomitante — fouille sans mandat — fouille abusive — violation des droits constitutionnels — critères établis dans R. c. Grant (C.S. Can., 2009-07-17), 2009 CSC 32, SOQUIJ AZ-50566222, J.E. 2009-1379, [2009] 2 R.C.S. 353 — gravité de la conduite attentatoire de l’État — conduite des policiers — absence de mauvaise foi — incidence de la violation sur les droits de l’accusé — intérêt de la société à ce que l’affaire soit jugée au fond — fiabilité — gravité de l’infraction — mise en balance des facteurs — meurtre au second degré — séquestration — appel.
DROITS ET LIBERTÉS — réparation du préjudice — exclusion de la preuve — messages texte — téléphone cellulaire — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — mandat de perquisition — critères établis dans R. c. Grant (C.S. Can., 2009-07-17), 2009 CSC 32, SOQUIJ AZ-50566222, J.E. 2009-1379, [2009] 2 R.C.S. 353 — gravité de la conduite attentatoire de l’État — conduite des policiers — absence de mauvaise foi — incidence de la violation sur les droits de l’accusé — intérêt de la société à ce que l’affaire soit jugée au fond — fiabilité — gravité de l’infraction — mise en balance des facteurs — recevabilité de la preuve — meurtre au second degré — séquestration — appel — absence d’erreur de droit.
PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — infractions contre la personne — meurtre — meurtre au second degré — victime âgée de 7 ans — accusée âgée de 38 ans — belle-mère — asphyxie — violation des droits constitutionnels — conduite des policiers — gravité — médiatisation — pouvoir discrétionnaire — identité de l’accusée inconnue — détention à perpétuité — délai d’inadmissibilité à la libération conditionnelle — appel — norme d’intervention — déférence.
PÉNAL (DROIT) — infraction — infractions contre la personne — enlèvement, séquestration — séquestration — procès devant jury — victime âgée de 7 ans — accusée belle-mère — recevabilité de la preuve — messages texte — animosité — preuve de mauvais caractère — pertinence — dynamique familiale — valeur probante — exclusion de la preuve — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — critères établis dans R. c. Grant (C.S. Can., 2009-07-17), 2009 CSC 32, SOQUIJ AZ-50566222, J.E. 2009-1379, [2009] 2 R.C.S. 353 — déclaration de culpabilité — appel.
Appel de verdicts de culpabilité. Appel de la peine. Rejetés.
L’appelante se pourvoit à l’encontre de 2 verdicts de culpabilité, un pour meurtre au deuxième degré et l’autre pour séquestration, prononcés par un jury. Elle se pourvoit également à l’encontre de l’ordonnance ayant porté à 13 ans la période d’inadmissibilité à la libération conditionnelle. L’appelante était la belle-mère de la victime, âgée de 7 ans.
Décision
M. le juge Doyon: Compte tenu de la médiatisation de l’affaire, le juge des requêtes, à la demande de l’appelante, a transféré le procès dans un autre lieu, soit à Trois-Rivières plutôt qu’à Granby. Cette dernière a été pleinement entendue sur son choix (soit le district de Montréal), mais n’a pas déposé de preuve permettant de conclure que seul ce choix pouvait assurer la tenue d’un procès équitable.
Quant à la saisie et à la fouille du téléphone portable de l’appelante, la première peut constituer la fouille sommaire d’une personne détenue aux fins d’une enquête (ou une fouille accessoire à une arrestation subséquente concomitante). En ce qui a trait à la fouille sans mandat qui a été réalisée quelques heures plus tard, le juge a estimé qu’elle était abusive. Il a toutefois précisé que l’atteinte était minimale; aucune des informations extraites à cette occasion n’a servi ni n’était nécessaire à l’obtention du mandat. Pour ce qui est du mandat, le juge a estimé que sa formulation était déficiente, ce qui a mené à une fouille abusive. Il a aussi souligné que la fouille et la saisie ont dépassé les limites imposées par le juge autorisateur, ce qui a également enfreint les droits protégés par l’article 8 de la Charte canadienne des droits et libertés. Le juge a toutefois déterminé qu’il n’y avait pas lieu d’exclure la preuve selon l’article 24 (2) de la charte, et la Cour ne voit pas d’erreur dans l’analyse des facteurs exposés dans R. c. Grant (C.S. Can., 2009-07-17), 2009 CSC 32, SOQUIJ AZ-50566222, J.E. 2009-1379, [2009] 2 R.C.S. 353.
Quant au dépôt en preuve de certains messages texte échangés entre l’appelante et son conjoint, il n’est pas question de preuve de propension à commettre le crime, mais bien de faits pertinents dans le contexte du dossier. L’appelante se plaint que le juge n’a pas donné de directive précise sur les dangers qu’une preuve de mauvaise moralité puisse mener le jury à conclure que l’accusée est probablement le genre de personne susceptible de commettre l’infraction. Or, lorsque, comme en l’espèce, la preuve est présentée en lien avec un mobile ou l’identité de l’auteur du crime, cette règle ne tient plus. Une inférence quant à la propension de l’appelante à voir de manière négative la victime est certes possible, mais elle est loin d’être la seule inférence possible. Ce qui ressort des messages texte est plutôt l’exaspération de l’appelante en raison des comportements d’une enfant difficile. Ces messages peuvent en outre démontrer l’intention, l’animus ou encore la dynamique familiale en lien avec l’infraction. De plus, le juge a décrit adéquatement la méthode pour évaluer l’effet préjudiciable des messages. En pareil contexte, ceux-ci sont hautement probants pour expliquer la séquestration prolongée de la victime, la fin illégale poursuivie dans le cadre de l’accusation de meurtre et l’insouciance en ce qui a trait aux conséquences probables de poser du ruban adhésif sur ou devant la bouche et le nez de la victime.
Pour ce qui est du mode de perpétration du meurtre selon la thèse de la poursuite, qui est celui prévu à l’article 229 c) du Code criminel, l’acte dangereux d’apposer le ruban adhésif sur l’ensemble du corps d’une jeune fille en pleine crise, y compris sur sa tête, sa bouche et son nez, tout en lui attachant le menton au thorax, est distinct de la fin illégale de la séquestration. Dans le continuum d’événements que représente la séquestration, il n’était pas question de vie ou de mort avant cet acte. En apposant le ruban adhésif sur tout le corps, particulièrement sur la tête, si la finalité est la même — séquestrer la victime — la dangerosité des actes est passée à un autre niveau: la mort est devenue une conséquence probable de l’acte commis pour atteindre la fin illégale.
Quant à la connaissance de l’appelante que l’acte dangereux causerait probablement la mort, il n’y avait aucune preuve d’état de panique; le juge n’avait pas à instruire le jury à cet égard. Dans ses directives, le juge a rappelé à plusieurs reprises la thèse de la défense selon laquelle l’appelante ne pensait pas qu’apposer du ruban sur la victime constituait un acte dangereux qui pouvait causer la mort. Par ailleurs, on ne peut prétendre que le juge n’a pas correctement expliqué au jury la nécessité de démontrer la connaissance subjective de l’appelante, par opposition à une connaissance objective. Sur la question de la prudence requise dans les circonstances avant de tirer une déduction conforme au «bon sens», les directives ne comportent pas d’erreur. Vu les circonstances ayant mené au décès de la victime, le «bon sens» mène irrémédiablement à une conclusion de connaissance subjective que l’acte causerait probablement la mort.
Il n’y a pas lieu d’intervenir à l’égard du délai préalable à la libération conditionnelle. En ce qui a trait à la décision du juge de ne pas considérer les violations constitutionnelles, ses conclusions démontrent que l’inconduite de l’État n’était aucunement d’une gravité pouvant s’apparenter à celle dans l’arrêt Kennett c. R. (C.A. (N.-B.), 2019-06-27), 2019 NBCA 52, SOQUIJ AZ-51616570. Enfin, l’appelante n’a présenté aucune preuve selon laquelle la médiatisation a fait obstacle à sa réhabilitation ou encore qu’elle a été démesurée, abusive ou oppressive. En outre, son identité n’est pas connue, ce qui réduit d’autant les effets de la médiatisation.
Le texte intégral de la décision est disponible ici
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