Summaries Sunday: SOQUIJ
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PÉNAL (DROIT) : La Cour annule la peine d’emprisonnement que la juge de première instance, qui s’est appuyée sur des facteurs aggravants qui n’en étaient pas vraiment, a imposée à l’accusé, un photographe professionnel déclaré coupable de possession de matériel de pornographie juvénile; elle ordonne que l’accusé purge une peine d’emprisonnement avec sursis de 1 an.
Intitulé : Joly c. R., 2024 QCCA 1151
Juridiction : Cour d’appel (C.A.), Montréal
Décision de : Juges François Doyon, Suzanne Gagné et Éric Hardy
Date : 9 septembre 2024
Résumé
PÉNAL (DROIT) — détermination de la peine — infractions de nature sexuelle — publications obscènes — possession de matériel de pornographie juvénile — nombre de fichiers (966 images) — accusé photographe — âgé de 50 ans — durée de l’infraction — infraction continue — possession — nature des fichiers — gravité objective de l’infraction — modification législative — fourchette des peines — culpabilité morale — dénonciation — dissuasion — détention — appel — norme d’intervention — erreur manifeste et déterminante — substitution de la peine — condamnation avec sursis — ordonnance de purger sa peine dans la collectivité — absence de danger pour la collectivité — absence de risque de récidive — probation.
PÉNAL (DROIT) — infraction — infractions de nature sexuelle — publications obscènes — possession de matériel de pornographie juvénile — nombre de fichiers (966 images) — accusé photographe — âgé de 50 ans — représentation — organes sexuels — but sexuel — moyen de défense — défense de but légitime lié aux arts (art. 163.1 (6) a) C.Cr.) — fardeau de la preuve — possession — contrôle — déclaration de culpabilité — appel — norme d’intervention — absence d’erreur manifeste et déterminante.
PÉNAL (DROIT) — preuve pénale — exclusion de la preuve — 966 images — pornographie juvénile — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — mandat de perquisition — maison d’habitation — matériel informatique — validité — suffisance de la dénonciation — motifs raisonnables — leurre — étendue du mandat de perquisition — limite temporaire — doctrine de l’objet bien en vue — absence de violation des droits constitutionnels — recevabilité de la preuve — possession de matériel de pornographie juvénile.
PÉNAL (DROIT) — garanties fondamentales du processus pénal — droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — exclusion de la preuve — 966 images — pornographie juvénile — mandat de perquisition — maison d’habitation — matériel informatique — validité — suffisance de la dénonciation — motifs raisonnables — leurre — étendue du mandat de perquisition — limite temporaire — doctrine de l’objet bien en vue — absence de violation des droits constitutionnels — recevabilité de la preuve — possession de matériel de pornographie juvénile.
DROITS ET LIBERTÉS — droits judiciaires — protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives — exclusion de la preuve — 966 images — pornographie juvénile — mandat de perquisition — maison d’habitation — matériel informatique — validité — suffisance de la dénonciation — motifs raisonnables — leurre — étendue du mandat de perquisition — limite temporaire — doctrine de l’objet bien en vue — absence de violation des droits constitutionnels — recevabilité de la preuve — possession de matériel de pornographie juvénile.
Appel d’une déclaration de culpabilité. Rejeté. Appel de la peine. Accueilli en partie.
Après la publication de photographies prises par l’appelant de 2 filles âgées de 15 ans partiellement dénudées, la police a envisagé la possibilité de la perpétration d’une infraction de leurre, et a obtenu un mandat pour perquisitionner la résidence de l’appelant. Ainsi, 966 photographies de pornographie juvénile copiées sur 2 supports informatiques trouvés dans un panier de rangement ont été récupérés. La Cour du Québec a déclaré l’appelant coupable de possession de matériel de pornographie juvénile et lui a imposé une peine d’emprisonnement de 12 mois.
Décision
M. le juge Doyon: Il n’y a pas lieu d’intervenir à l’égard de la décision de la juge de première instance de refuser d’exclure les éléments de preuve trouvés chez l’appelant. Elle pouvait conclure que la dénonciation sous serment en vue d’obtenir le mandat de perquisition contenait des allégations suffisantes de l’existence d’une infraction de leurre. Le juge autorisateur pouvait autoriser la fouille et la saisie des appareils décrits dans la demande de mandat. Par ailleurs, prévoir une limite temporelle afin que la saisie ne puisse porter sur des éléments de preuve antérieurs aux communications avec les 2 jeunes filles aurait pour conséquence de prohiber toute recherche à l’intérieur d’un document informatique créé avant la période infractionnelle. De plus, il serait faux de prétendre que la dénonciation ne permettait pas de conclure à la perpétration d’infractions de leurre à l’endroit d’autres victimes à d’autres moments. Enfin, même si le disque dur externe contenant les photographies des 2 jeunes filles avait été découvert, la perquisition pouvait se poursuivre puisque son objet ne se limitait pas à ce disque dur. Les policiers devaient examiner sommairement les fichiers trouvés dans le panier de rangement pour s’assurer qu’ils étaient reliés à la perquisition. Constatant alors qu’il s’agissait de pornographie juvénile, leur saisie se justifiait par la théorie des objets bien en vue.
Quant à la culpabilité de l’appelant, le raisonnement de la juge sur la question de la possession des fichiers et ses conclusions en ce qui concerne leur caractère pornographique sont raisonnables.
En ce qui concerne la peine, prétendre, comme l’a fait la juge, que l’infraction a duré 18 ans constitue une erreur si cette circonstance est de nature à aggraver la culpabilité morale de l’appelant. La juge a reconnu que ce dernier, qui a témoigné avoir téléchargé les fichiers à la fin des années 1990 et au début des années 2000, pouvait bien avoir oublié l’existence des fichiers au cours des ans. La période de référence étant l’année 2001, la gravité objective de l’infraction devait alors être évaluée sur la base d’une peine maximale de 5 ans, sans peine minimale. Pourtant, la juge a justifié la peine en se basant notamment sur des jugements concernant une époque où la gravité objective de l’infraction était plus élevée qu’au moment de sa perpétration.
Sans motif supplémentaire, et alors que les fichiers s’apparentent aux circonstances les moins graves vues dans la jurisprudence, il est difficile de comprendre pourquoi la juge a classé la «nature des fichiers» parmi les facteurs aggravants. Il est possible que les autres images d’enfants nus, qui ne constituent pas pour autant de la pornographie juvénile, trouvées chez l’appelant puissent être pertinentes pour démontrer un objectif sexuel concernant ceux de pornographie juvénile, mais la Cour ne voit pas comment des photographies qui ne sont pas criminelles pourraient devenir une circonstance aggravante.
Malgré ces erreurs, l’emprisonnement était la peine appropriée, sans nécessairement atteindre la durée déterminée par la juge, laquelle s’est laissé guider par quelques facteurs aggravants qui n’en étaient pas vraiment. Or, cette dernière n’a jamais considéré sérieusement la possibilité d’imposer l’emprisonnement avec sursis. Le présent dossier est l’un des cas de possession de pornographie juvénile où l’emprisonnement peut être purgé dans la collectivité, compte tenu du profil de l’appelant. Il y a donc lieu d’annuler la peine prononcée par la juge et d’ordonner à ce dernier de purger dans la collectivité une peine de 1 année.
Le texte intégral de la décision est disponible ici
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